BAPTÊME DU SEIGNEUR
Père Jacques Wersinger
L’évangile de ce dimanche inaugure pour l’Eglise le « temps ordinaire » : c’est à dire le temps de la vie de baptisés. ON n’est pas dans la joie de la naissance. On n’est pas dans la joie de la résurrection finale. On est dans la vie ordinaire. Et c’est dans ce quotidien, souvent entre gris clair et gris foncé, dans des situations pas toujours prévues ni désirées que se vit l’essentiel de la vie chrétienne. C’est à dire notre adhésion de cœur au Christ, que nous rencontrons aussi bien dans l’eucharistie que dans les rues de Châlons. Puisque le temps ordinaire est le temps où nous vivons, mettons en œuvre notre baptême, pour nous guider, l’église a donc choisi ce passage où les disciples de Jean discutent du sens du baptême. Ces gens sont inquiets car un bon nombre des disciples de Jean vont rejoindre Jésus. Je ne vais pas énumérer ce que signifiait le baptême de Jean. C’est un changement de style de vie pour mener une existence belle et droite, ne pas se contenter de « faire comme tout le monde » en abusant de ses droits ou de son pouvoir, et en vivant une certaine austérité, à l’image de Jean, se nourrissant et s’habillant de peu.
Mais ce que n’ont pas compris les disciples de Jean, c’est que cela n’est pas le dernier mot. Ce n’est pas encore la joie chrétienne. Ce n’est que la préparation à la rencontre du Seigneur. Le baptême de Jean-Baptiste n’est pas à mettre en parallèle et en concurrence avec celui de Jésus. Il y conduit. Quand Jean demande qu’on rende droits les chemins, ce n’est pas pour le plaisir d’avoir une route droite ! C’est pour faciliter notre rencontre du Seigneur. Le sens du bain du baptême de Jean, c’est une purification, une préparation. On se fait beau pour la rencontre. Et Jean va même beaucoup plus loin en précisant la nature de cette rencontre : « celui qui a l’épouse est l’époux ». Autrement dit, ceux qui sont passé par son baptême et la conversion du cœur vont désormais vers Jésus comme l’épouse va vers son époux. Ce n’est pas à une vie parfaite et sans reproche que nous sommes appelés. C’est à l’union des cœurs avec Jésus, à une amitié si profonde que finalement nous ne faisons qu’une seule chair avec le Fils unique, et que nous pouvons dire que nous sommes son corps sur terre. Le baptême du Christ n’est pas une purification, mais une naissance et une adhésion ... On devient, en Jésus, comme membre de son corps, participant du Fils unique et bien aimé de Dieu. Ce changement dans notre manière de comprendre notre vie et de comprendre Dieu est tel qu’on dit que c’est une véritable naissance. Nous naissons à la vie d’enfants de Dieu. Et on sait que le baptême donné par Jésus, ce n’est pas avec de l’eau, qui n’en est que le symbole. C’est avec son sang versé pour nous par amour, qu’il nous purifie de tout péché et veut unir son âme à la nôtre.
J’entends parfois des adultes regrettant d’avoir été baptisés tout petits. Je comprends leur démarche : ils voudraient faire à leur compte, bien consciemment la démarche d’adhésion au Christ. Cependant, le baptême est compris comme une naissance, et on ne peut pas désirer naître adulte pour mieux comprendre l’amour de sa maman. Le baptême n’est donc pas tout à fait comme l’adhésion à un club, ou la demande de nationalité française. En effet on ne décide pas de devenir « enfant de Dieu ». Et nous savons que Dieu est père de tous. En revanche, on décide de se ou de ne pas se comporter en enfant de Dieu, ce qui n’est pas la même chose... On peut faire confiance à ses parents ou pas, on peut les aimer ou les haïr, on peut ignorer qui ils sont. Mais on ne peut pas décider de notre origine, de nos racines, de nos parents.
C’est cela que nous donne le baptême : il révèle notre identité la plus profonde. Nous savons, quand nous baptisons un bébé qui ne comprend encore rien, aussi bien qu’un adulte, que ce sont déjà des enfants bien aimé du Père. C’est parce qu’ils le sont déjà que nous baptisons, car Dieu ne nous attend pas pour donner vie et aimer. Mais il attend notre réponse. Et on ne peut pas facilement répondre à l’amour de nos parents et respecter leur volonté si nous ne les connaissons pas. Pussions-nous toute cette année vivre notre baptême, chercher à mieux connaître le Christ et notre Père, et devenir de plus en plus conforme à notre identité profonde d’enfants de Dieu, grâce au Christ, l’époux de nos cœurs.
Père Jacques WERSINGER